Démarche

Ce qui advient (3), détail gravure au burin, 2018

Au départ …

Il y a ce goût pour le corps, la peau, la chair, les bribes, les cicatrices et plis secrets, mémoires invisibles et indélébiles. C'est ce qui me porte et me pousse dans mes recherches : les traces du temps sur le vivant.

Souvent ombres et lumières se cherchent, se parlent…

Dire sans dire, montrer sans montrer, changer d'espace, d'échelle.

 

Graver, dessiner

Pour moi graver c'est un peu se perdre pour se trouver.

La gravure au burin m’apporte ceci de précieux : la conjugaison de la lenteur et de l’urgence, mariage improbable qui, comme un révélateur, amène à un dépassement de soi. Urgence des formes qui demandent à naître, laisser trace.

Vivre dans le sentiment que tout est décousu et pourtant lié, inexorablement .

Le temps glisse. La surprise de vivre m’étreint.

La dualité comme terreau.

La lenteur choisie de la gravure au burin amène à un mûrissement souterrain de tout cela, impossible à anticiper. Il y a des gestes concis, parfois minuscules, ou au contraire amples, toujours un voyage dans le temps, les sens en éveil.

Travail en aveugle, des mois sans savoir, car je ne réalise aucune épreuve tant que la suite de gravures en cours n’est pas terminée, tant que je n’ai pas épuisé ce que je devais donner et que j'ignorais.

Et puis, le pincement au cœur, indispensable indice que ce miroir qu’est l’estampe est prêt pour aller à la rencontre d’autres regards.

Le dessin offre une autre temporalité, permet une rapidité d’exécution dans un geste primal. Dans tous les cas, il s’agit de s’approcher au plus près de l’essentiel, du fugace, de l’indicible.

Microcosme et macrocosme sont au cœur de tout mon travail. Les incisions précises du burin guident vers l’infime et l’intime, grâce au temps long de l’écriture dans la chair du cuivre. Le geste libéré du dessin impose la lecture de fragments d’un monde éclaté.

Tout est mouvement, tout est en suspens. L’espace et le temps sont révolus. Organique et minéral se conjuguent, dans la quête de faire corps avec l’infini.

C Gillet

Catherine Gillet, dans l'atelier

dans l’atelier. Photo Claudine Grin